Les 9e rencontres annuelles de la Clinique consacrées aux effets de l’enfermement

À destination des psychologues du ministère de la Justice, les 9èmes rencontres annuelles de la Clinique (RAC), intitulées « Quelle clinique possible auprès des mineurs détenus ? », se tiendront les jeudi 6 et vendredi 7 novembre 2025 à l’École nationale de protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ), à Roubaix (Hauts-de-France).

Les 9e rencontres annuelles de la Clinique consacrées aux effets de l’enfermement

À destination des psychologues du ministère de la Justice, les 9èmes rencontres annuelles de la Clinique (RAC), intitulées « Quelle clinique possible auprès des mineurs détenus ? », se tiendront les jeudi 6 et vendredi 7 novembre 2025 à l’École nationale de protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ), à Roubaix (Hauts-de-France).

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Cette année, l’ENPJJ réitère l’organisation de ces rencontres annuelles spécifiquement destinées aux psychologues du ministère de la Justice.  Les inscriptions s’effectueront exclusivement sur Harmonie (51592061) avant le 6 septembre 2025.

Quelle clinique possible auprès des mineurs détenus ?

Le dernier rapport concernant les effets de l’enfermement sur les mineurs détenus (Alice SIMON, septembre 2023, SEREV/DPJJ) souligne les conséquences de la détention sur l’isolement des mineurs et la carence de lien social nécessaire à leur développement. Le contexte carcéral n’est pas propice à des relations amicales sereines et favorise la conflictualité. La prise en charge médicale en détention répond difficilement aux besoins des mineurs. Enfin et de manière générale, la détention constitue une expérience douloureuse pour les mineurs qui se voient dans l’obligation de mettre en place diverses stratégies d’adaptation pour la supporter.

En qualité de psychologues cliniciens à la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), si nous constatons parfois un apaisement de certains sujets lors de leur incarcération - du fait d’une certaine régularité et d’une contenance stricte venant faire opposition à une jouissance débridée « hors » les murs -, les effets de l’enfermement sont généralement vus comme ayant un impact délétère dans le développement du mineur. Pour les adolescents les plus fragiles, la glorification fantasmée de la prison comme point d’acmé initiatique d’une trajectoire délinquante se heurte bien souvent à la réalité du choc carcéral. L’éloignement des proches, du lieu de vie habituel, s’avérant problématique en hébergement classique, est ici décuplé par l’isolement radical qui s’impose vis-à-vis de la société et de la sociabilité usuelle. Cela peut entrainer des mouvements de repli subjectif archaïques, d’annihilation de soi-même pouvant s’acter directement dans le réel par le biais des tentatives de suicide, plus fréquentes qu’à l’extérieur.

Les dynamiques/identifications de groupe, les phénomènes de harcèlement, déjà potentiellement mortifères entre les groupes de pairs au-dehors s’en trouvent accentués en détention. Sans compter les consommations excessives de stupéfiants et de médicaments de ces jeunes qui cherchent à s’échapper artificiellement et à donner parfois aux professionnels l’impression d’aller à la rencontre de « zombies », figure de l’être immobilisé dans un entre-deux monde et dont il peine à s’extraire.

Pourtant puisque leur présence entre ces murs est réalité et puisque nous y sommes présents, la question se pose : une clinique en enfermement est-elle possible ? Si oui, laquelle ? Cela peut-il passer, par exemple, par un maillage et une meilleure contenance avec tous les partenaires institutionnels et associatifs des autres services présents au sein de la détention Cela n’implique-t-il pas une coordination mieux pensée et structurée avec les services de la PJJ qui accompagnent le mineur vers l’extérieur (Milieu Ouvert et hébergement) ? 

Appel à communications

Ces journées de conférence prévoient un temps de partage en ateliers. Ces ateliers, d’une durée de deux heures, s’appuient sur des communications, de 20 à 30 minutes environ, en lien, dans la mesure du possible, avec la thématique des journées. Les psychologues intéressés ont la possibilité de proposer une communication visant à exposer une analyse de situation, une expérimentation professionnelle ou une recherche universitaire.

Les propositions sont à adresser à Janique Lepage (janique.lepage(at)justice.fr) et Guillaume Grasland (guillaume.grasland(at)justice.fr) avant le vendredi 24 octobre 2025.

Programme

Jeudi 6 novembre 2025

9h15 : Café d’accueil

9h45 : Accuel institutionnel

10h/11h15 : L’expérience carcérale des mineurs 

Alice Simon présentera sa recherche de sociologie sur l’expérience carcérale des mineurs. A partir d’une enquête menée dans 9 établissements pénitentiaires, cette recherche analyse comment la « peine » de prison se matérialise au quotidien pour les jeunes détenus et la façon dont ils intériorisent et incorporent les contraintes de l’environnement carcéral. Cette recherche montre que l’incarcération est une expérience douloureuse pour les adolescents, en raison des conditions matérielles d’existence et du sentiment de dévalorisation dont ils font l’expérience. Les effets de l’incarcération varient selon les jeunes, à la fois en fonction de leurs conditions d’incarcération, de leurs caractéristiques sociales, de leurs trajectoires antérieures ou encore de la durée de leur incarcération.

Alice Simon, Sociologue, responsable du pôle recherche de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse

11h15/11h30 : Pause

11h30/12h45 : Les effets de l'enfermement

Prenant appui sur plusieurs recherches menées sur la médiation animale auprès de mineurs incarcérés en établissement pénitentiaire, sur différents dispositifs-pilote d'aide à la réinsertion sociale mais aussi sur des situations d'expertises, cette contribution analyse les points-pivots dans la prise en charge de mineurs placés sous-main de justice. Les effets psychologiques sont indissociables des réponses sociales et judiciaires aux faits commis, parfois aussi subis. Ces dernières déterminent la manière dont le mineur est perçu et s'inscrit dans le lien social, se forge son identité sociale et se projette dans l'avenir. Nous reviendrons sur les notions de responsabilité et de culpabilité qui ne renvoient pas aux mêmes réalités en droit et en psychologie. Le travail autour de la responsabilité et la culpabilité n'est possible qu'à condition de pouvoir s'assurer de la réceptivité du jeune. L'enferment peut renforcer et rigidifier les mécanismes de défense par autoprotection et s’avérer contre-productif quant aux attentes de responsabilisation vis-à-vis du jeune. Pour autant des aménagements sont possibles à condition de travailler sur le cadre institutionnel, le mode relationnel et le rapport à soi avec les jeunes. Le travail pluridisciplinaire présente un atout majeur, tout comme la prise en compte des temps psychiques, judiciaires et éducatifs.

Astrid Hirschelmann, Professeur des Universités (Psychologie clinique et psychopathologique), Laboratoire de Psychologie Caen Normandie
 

12h45/14h : Pause-déjeuner

14h/15h15 : Une coordination interinstitutionnelle Santé & Justice opérante

Le placement en détention ne constitue pas inévitablement un facteur d’altération de la santé somatique et psychique. Il participe également à l’émergence de mouvements psychiques conduisant à de nouvelles conduites, à de nouveaux comportements… de nature prosociale, dès lors que le cadre et le contexte carcéral en proposent l’occasion. L’un et l’autre nécessitent d’être coconstruits et portés par les professionnels des institutions qui interviennent conjointement auprès des adolescents incarcérés. Cette conjonction interprofessionnelle et pluridisciplinaire se traduit par une coordination interinstitutionnelle entretenue au quotidien au sein de laquelle la dimension sécuritaire appréhendée et développée par les professionnels se porte alors sur la personne du mineur. Elle contribue alors à garantir sa protection, à la fois physique et psychique, à partir de laquelle de nouvelles positions relationnelles doivent s’inventer face à des postures professionnelles inattendues.

Pascal Le Bas, psychologue hospitalier, EPSM Sud Bretagne - Centre Pénitentiaire de Lorient-Ploemeur

15h15/15h30 : Pause

15h30/17h : Ateliers

17h/18h :  Temps de convivialité

18h/19h30 : Projection de Théret n°487

Réalisé par Julien Hillion (documentaire / 50 minutes)

François-Henri Théret est né à Paris à la fin du XIXe siècle. Gamin pauvre des rues, il est livré à lui- même. Plusieurs passages devant le tribunal correctionnel finissent par le conduire à la maison de correction de Belle-Ile-en-Mer. Baigné dans un univers militaro-carcéral inédit, il y vit les pires traitements et prend part à une révolte qui le conduit au cachot. À travers son parcours, c'est toute la question du traitement de la jeunesse délinquante qui est posée : faut-il vraiment enfermer les enfants délinquants pour les rendre meilleurs ?

 

Vendredi 7 novembre 2025

9h/10h : Quel travail clinique en établissement pénitentiaire en tant que psychologue à la PJJ ? Une expérience en EPM.

Travailler comme psychologue à la Protection Judiciaire de la Jeunesse et dans un établissement pénitentiaire impose de relever le double défi de parvenir à occuper une place de clinicien dans une institution éducative (la PJJ), dans un établissement d’exécution de sanctions pénales (l’AP), sans être à proprement parler un personnel soignant, tel le psychologue de l'USMP ou du S.M.P.R., clairement chargé d’une mission de soins.

Il est pourtant possible de construire une clinique respectant les différents cadres institutionnels de l’AP de la PJJ, ainsi que le cadre d’intervention, l’éthique et la déontologie du psychologue. Au final, cette pratique n’est pas si éloignée de celle du psychologue à la PJJ en milieu ouvert.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur ce que représente l’expérience de la détention pour un adolescent quant au processus de séparation-individuation, travail psychique fondamental lors de cette phase de développement.

Chantal Genevois, psychologue à la PJJ (UEMO Saint-Denis de la Réunion)

10h/10h15 : Pause

10h30/12h30 : Table ronde - Témoignages de psychologues de la PJJ travaillant en détention (EPM et QM)

12h30 : Fin des rencontres